Par son extraordinaire soutien de foi envers David oint de l’Éternel, Jonathan a marqué le cours de l’histoire d’Israël. Jonathan signifie : celui que par grâce l’Éternel a donné. Dieu l’a donné à ses parents, et encore plus à David. Fils de Saül, le premier roi d’Israël (1 Sam), Jonathan est exemplaire à deux niveaux : d’abord comme un personnage déterminant dans la volonté de Dieu au temps des débuts de la royauté (plus de 1000 ans AC), mais aussi comme un prototype de tout converti à Jésus le Messie.

 

Le contexte global est le début de la royauté, et la guerre avec les Philistins.

Jonathan a vécu en un temps d’agressive hostilité des Philistins envers Israël (par exemple au moment d’un rassemblement de repentir de tout Israël, 1 Sam 7 v 7) avec des attaques répétées, en fait un état de guerre permanent (14 v 52).

Sous quel angle faut-il lire les récits de guerres dans l’AT ? Si certains héros de foi furent vaillants à la guerre (Hb 11 v 34), c’est que Dieu avait pour un temps mis une exception à : tu ne tueras point (Exd 20 v 13). À cause du commandement fondamental : tu n’auras pas d’autres dieux devant ma face (v 3), l’Éternel avait autorisé en Israël que la lutte contre la séduction d’autres dieux soit aussi une guerre contre les habitants de Canaan. L’exception se limitait à cet enjeu : se maintenir fidèle à l’Éternel et ne pas adopter les divinités des voisins. Tu les chasseras devant toi … ils n’habiteront pas dans ton pays de peur qu’ils ne te fassent pécher contre moi, car tu servirais leurs dieux et ce serait un piège pour toi (Exd 23 v 32).

Pour nous aujourd’hui, Jésus est parfaitement clair : ne pas prendre l’épée (Mt 26 v 52), ne pas lutter contre la chair et le sang (Eph 6 v 12) mais contre les esprits du mal, contre le péché. Notre lutte est : le péché nous enveloppe si facilement (Hb 12 v 2), et elle peut coûter beaucoup : vous n’avez pas encore résisté jusqu’au sang en combattant contre le péché (v 4), par exemple : la persécution pour cause de fidélité à Christ, ou de refus des perversions.

 

Jonathan : un homme à qui Dieu donne une victoire.

(1 Sam 13 v 2 à 8) Le texte biblique introduit Jonathan sans même dire qu’il est fils de Saül, sans situer son parcours, sans décrire sa personnalité. Il dit seulement que, face à une énième préparation d’offensive philistine, Saül retient 3000 hommes dont 1000 sont confiés à Jonathan. Puis, sans commentaire, le texte relève une initiative de Jonathan : il bat une garnison ennemie (v 3), et les Philistins l’apprennent. Pourtant, ce sera une victoire éphémère. D’une part Saül veut mobiliser tout Israël mais il le fait en jouant sur la peur : Israël se rend odieux aux Philistins (v 4) qui alors les contrôlaient vraiment (v 19 à 22). D’autre part l’ennemi rassemble une force nombreuse comme le sable de la mer. Résultat, une peur croissante s’infuse chez les Israélites qui se cachent où ils peuvent (v 6), même les hommes de Saül tremblent et peu à peu se disséminent loin de lui (d’où la grave désobéissance mentionnée au v 9).

Je dois en tirer leçon : même si la peur est compréhensible, même si face au danger elle n’est pas un péché, Dieu ne veut pas que je la laisse régner sur moi ni dans l’église. Elle est une réaction naturelle de mon cœur, mais ne doit pas s’y installer. Car là où la peur devient maître de mes décisions, elle me mène à pécher (par exemple, chacun sait combien souvent la peur fait mentir).

 

Une foi exemplaire.

Dans un contexte de peur généralisée, brille une deuxième initiative de Jonathan (1 Sam 14 v 1), bien plus remarquable que la précédente : avec le seul concours de son second, le jeune homme qui portait ses armes (pas avec 1000 hommes), il se dirige vers un poste avancé ennemi. Le texte souligne fortement que Jonathan fait cela avec de la foi en un salut que l’Éternel peut accorder au moyen d’un petit nombre comme d’un grand nombre (v 6 à 10). Dieu honore cette foi en accordant une deuxième victoire, modeste mais surnaturelle (v 11 à 14), à partir de laquelle une panique venue de Dieu (v 15) saisit les forces ennemies qui étaient considérables. Ainsi, Jonathan est pour son peuple l’instrument d’un grand salut accordé par l’Éternel (v 23 et 45). Et cela malgré un serment orgueilleux de Saül (v 24) qui n’a fait qu’affaiblir ses hommes, serment par lequel Jonathan ne se laisse pas troubler (v 29). Sa foi, qui se révèlera capable d’humilité, apparaît comme un don de Dieu et cela d’autant plus qu’elle s’est construite auprès d’un père impulsif plus qu’homme de foi, tenant à son importance plus qu’à la volonté de Dieu.

La foi de Jonathan est un modèle ! Mais je dois aussi imiter le soutien que son jeune second (anonyme comme le serviteur d’Abraham, comme la veuve aux deux pites) lui a apporté : fais tout ce que tu as dans le cœur, n’hésite pas, me voici de cœur avec toi (v 7). La manière dont il encourage l’initiative de Jonathan est pour moi un modèle d’appui fraternel envers quelqu’un qui aurait plus de foi que moi ! Si Dieu inspire à un membre de l’église une initiative qui sert l’Évangile, ce membre-là doit trouver chez moi plus de paroles d’encouragement que de mise en garde, plus de foi que de peur. Sinon, il y a un vrai déficit spirituel comme dit Jésus : celui qui n’assemble pas avec moi, disperse (Mt 12 v 30).

 

Dieu a fait avec Jonathan, Dieu a fait avec un autre.

Cette guerre finie, le texte (ch 15) relate une expédition de Saül contre Amalek, puis encore une désobéissance et son rejet confirmé par l’Éternel ; que dit ce chapitre sur Jonathan ? Rien. Ensuite (ch 16) arrive une grande chose : Dieu envoie Samuel chez Isaï de Bethléhem pour secrètement oindre roi son plus jeune fils, David ; que dit ce chapitre sur Jonathan ? Rien. Plus tard (ch 17), nouvelle offensive des Philistins avec Goliath leur héros géant, forte crainte de tous les Israélites, et surprenante foi de David qui au nom de l’Éternel tue le géant ; que dit ce chapitre sur Jonathan ? Rien. Sans doute présent comme l’était Saül sur les lieux où Goliath défiait l’Éternel, Jonathan ne fait rien et ne dit rien non plus. Le texte n’explique pas ce silence mais laisse imaginer que, Dieu ayant prévu la délivrance par un autre que lui, si Jonathan avait juste voulu refaire « comme avant » ça n’aurait pas été de la foi. En effet, ce qui ne répond à une impulsion de Dieu n’est pas de la foi.

 

Le sommet de foi de Jonathan : son alliance avec David.

Dès la victoire sur Goliath, Jonathan s’attacha à David et l’aima comme son âme (1 Sam 18 v 1). Lui qui, avant David, avait été l’instrument d’un grand salut pour Israël, n’éprouve aucune jalousie ni aucune crainte de voir éclipsée son image de héros libérateur ! Contrairement à son père presque aussitôt jaloux de David, avec une grande colère (v 6 à 9), Jonathan l’aime sans réserve comme celui que Dieu suscite pour à nouveau délivrer Israël. Son attachement à David lui inspire, de manière sainte, une alliance totale (v 3) ce qui dans l’Israël de l’époque n’existait qu’entre le peuple et Dieu. Alliance spirituelle, que les deux réfèreront toujours à l’Éternel. Cependant, au moment de la victoire sur Goliath, Jonathan ignore sans doute que Dieu avait fait oindre David comme prochain roi. Peut-être a-t-il perçu quelque chose venu de Dieu, quand il l’a entendu raconter à Saül comment il sauvait une brebis de la gueule d’un lion ou d’un ours, dans le cadre de son travail de berger ?

Il faut admirer la consécration de Jonathan à David, au point qu’il lui abandonne de manière publique son prestige et sa puissance de fils du roi : il ôta le manteau qu’il portait pour le donner à David, ainsi que son habit et même son épée, son arc et sa ceinture (v 4). Il s’agit là d’une humilité et d’un discernement spirituel : Jonathan honore sans réserve le fait que David ait reçu de Dieu plus que lui. Quand le vrai Oint viendra, il dira : quiconque d’entre vous ne renonce pas à tout ce qu’il possède ne peut être mon disciple (Lc 14 v 33).

 

Une loyauté plus forte envers David qu’envers son père et le trône.

Très vite, Saül parle de faire mourir David (1 Sam 19 v 1 à 3). Non seulement Jonathan avertit ce dernier, mais il prend le risque de s’en faire l’avocat devant son père (v 4 à 6). Il sera écouté, mais provisoirement, car Saül résiste au dessein de Dieu et donc l’alliance spirituelle entre son fils et David lui échappe. Le texte insiste, Jonathan va faire preuve de cette loyauté sans faille (1 Sam 20 v 9) pendant des années, aussi longtemps que Saül poursuivra David. Il sait qu’il peut mourir avant que Dieu n’ait établi le trône de David (v 14), il prie même que Dieu soit le vengeur de David (v 16). Loyauté qui lui vaut des insultes ordurières de son père (v 30), loyauté qui l’emporte sur la défense du trône dont il devait hériter (v 31), loyauté qui rapidement a failli lui coûter la vie (v 33). Selon l’expression future de Pierre, Jonathan s’est désolidarisé de la mauvaise manière de vivre héritée des pères (1 Pi 1 v 18).

Plus tard, alors que David pourchassé par le roi, caché, dénoncé, fuyard, est réfugié dans une forêt, Jonathan prend encore le risque d’être accusé de ‘haute trahison’ et va le trouver pour affermir son courage en Dieu (1 Sam 23 v 15-16) : sois sans crainte, car la main de Saül mon père ne t’atteindra pas ; tu règneras sur Israël et moi je serai au second rang près de toi ; Saül mon père le sait aussi (v 17). Il confirme son renoncement au trône dont il devait hériter, admirablement il aime le fait que Dieu a oint David ! Si Jonathan envisage un statut et une collaboration futurs, c’est aussi à cause de l’alliance conclue et plusieurs fois confirmée entre lui et David (v 18). En tout cela, Jonathan est encore un modèle d’humilité : il manifeste à David un soutien infiniment précieux, du même genre que celui qu’il avait lui-même reçu des années auparavant de la part du jeune homme qui portait ses armes.

 

David resta dans la forêt, et Jonathan s’en alla chez lui.

(v 18) Limites de la vertu d’un fidèle frère, seule ‘inconséquence’ dans l’histoire de Jonathan et son incroyable dévouement : bien que lucide sur son père rejeté par Dieu, il ne va pas jusqu’au bout de sa consécration. Il conserve son chez lui, dans le prestige et le confort dont il jouissait en tant que fils du roi actuel. Qui suis-je pour blâmer Jonathan de n’être pas sorti hors du camp pour porter l’opprobre (Hb 13 v 13) de l’oint qui n’avait pas un lieu pour reposer sa tête (Lc 9 v 58) ? Au contraire, cet unique ‘manque’ du fils de Saül me rappelle que même en étant tout consacré à Christ, il reste une chose à laquelle je suis naturellement réticent : perdre ma vie pour lui.

Au final Jonathan ne reverra plus David, et sera tué avec son père dans une défaite face aux Philistins (1 Sam 31 v 2 et 4). C’est une fin triste pour un personnage aussi admirable ; c’est sa fin physique seulement, la foi de Jonathan était en l’Éternel ! En effet, au-delà de son histoire personnelle, Jonathan reste le plus éloquent prototype de ceux qui entrent dans l’alliance du Christ.

 

 

 

La consécration de Jonathan à David préfigure notre conversion à Christ et l’attachement sans égal que nous lui devons.

Que le dévouement de Jonathan soit total envers un être humain, envers le futur roi oint par l’Éternel, est normal dans l’AT. Bien sûr, le NT ne montre nulle part un dévouement aussi absolu envers un homme de Dieu (comp. 1 Co 3 v 4), parce qu’il montre une consécration totale au fils de David, à Christ seul roi. Et c’est justement de cela que Jonathan est le double prototype.

C’était un Israélite, fils de Saül (oint mais indocile) ; mais aussi un fils d’Adam (créé sans péché mais déchu). Jonathan a eu foi en l’Éternel, le Dieu d’Israël ; c’est aussi un humain qui a une mesure de foi. Il a vu ce que l’Éternel avait fait avec David ; il est comme un homme mis face au Messie. Jonathan s’est réjoui de l’onction de David, il l’a aimé, il a fait alliance avec lui ; c’est le prototype d’un homme qui se convertit au Messie. Il se dévoue à David en vue du règne à venir ; comme un disciple renonçant à soi-même pour le Christ ! En tout cela « l’imparfait parcours modèle » de Jonathan figure et celui d’un juif messianique et celui de tout chrétien (Messie et Christ signifiant la même chose). D’une part : hébreu né d’hébreux, irréprochable quant à la justice légale, ce qui était pour moi un gain je l’ai considéré comme une perte … à cause de l’excellence de la connaissance de Jésus Christ mon Seigneur (Phil 3 v 4 à 8). D’autre part, Jésus dit à tous : si quelqu’un m’aime, mon Père l’aimera (Jn 14 v 23).