Ces mots sont de notre Seigneur, le Christ : là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis au milieu d’eux (Mt 18 v 20). En disant cela, il dit ce qui fait l’Église : Christ se rend présent là où des disciples se rassemblent en son nom c’est à dire « selon sa volonté » et « intentionnellement vers lui ». Jésus dit ces mots en parlant de l’église locale (v 17). L’église concrète, celle où il arrive qu’on pèche contre un frère mais qu’ensuite on l’écoute (v 15), celle où on s’accorde pour demander quelque chose au Père qui est dans les cieux (v 19).
Jésus garantit : je suis tous les jours avec vous, et aussi : je suis au milieu d’eux.
Est-ce une même garantie formulée de deux manières ? Ce sont plutôt deux garanties complémentaires. Une garantie que le Seigneur donne aux siens, c’est qu’il sera avec eux (Mt 28 v 20b), alors qu’ils iront partout faire des disciples (v 19a), quand eux et les nouveaux disciples garderont ce qu’il a prescrit (v 20a). Et il précise bien : tous les jours. Ce verset ne parle pas de l’omniprésence divine, mais de la présence de Jésus avec eux, présence expérimentée partout et en permanence, et dans leur mission commune et dans la journée de chacun. Présence qui anime et leur service pour lui et leur vie de prière avec sa Parole.
Mais, en amont, le Seigneur donne aux siens une autre garantie, c’est qu’il est au milieu d’eux là où ils se rassemblent avec pour intention première d’être autour de lui ! Par cette promesse, Jésus pointe la nature profonde de son église : elle est le corps dont lui est la tête, le centre. Un corps dont l’articulation des membres lui importe si fort que la convergence de deux ou trois vers lui, suffit pour valider un catégorique « je suis au milieu ». Et cette promesse est la seule que, pour ici-bas, notre Seigneur relie à l’idée d’un lieu : là où deux ou trois … là je suis au milieu d’eux (litt. c’est redit deux fois). À la question : « Jésus qui siège à la droite de Dieu, où est-il présent sur terre ? », le NT n’a pas d’autre réponse que : là où deux ou trois sont assemblés en mon nom. (cp. si quelqu’un vous dit alors : le Christ est ici, ou : il est là, ne le croyez pas, Mt 24 v 23)
Dieu avait éduqué les Israélites à le rechercher dans le lieu choisi par lui.
Le Deutéronome le répète dix-sept fois. Quand vous serez installés au pays que Dieu vous donne, vous le rechercherez dans le lieu que l’Éternel votre Dieu choisira pour y placer son nom et l’y faire demeurer (Dt 12 v 5). C’est là que vous présenterez vos holocaustes et sacrifices (v 11), et non dans n’importe quel lieu (v 14). À terme ce lieu fut le mont Sion et le temple bâti dessus, temple que la nuée de Dieu a rempli (1 Rois 8 v 10-11), mais temple dont Jésus a dit : il ne restera pas ici pierre sur pierre qui ne soit renversée (Lc 21 v 6).
Dieu enseigne ainsi que le lieu géographique où il avait placé son nom, figurait un lieu spirituel, un lieu éternel qui est la personne même de Jésus Christ ! Il faut l’entendre, Jésus a affirmé être lui-même le vrai temple (Jn 2 v 19). Pour cette raison-là il pose comme seule condition à ses fidèles de se rassembler vers lui. Là seulement il les coordonne en un temple saint, une habitation de Dieu en Esprit (Eph 2 v 21-22). Certes, leur être individuel est un temple du Saint Esprit (1 Co 6 v 19), mais il y a plus : ensemble ils sont le temple de Dieu à mesure qu’il les coordonne en Christ. C’est la même double dimension que Jésus indique : je suis tous les jours avec chacun, et : je suis au milieu de ceux assemblés en mon nom.
Déjà l’AT, hormis le lieu physique choisi par Dieu, parle d’un lieu spirituel : c’est là que l’Éternel donne la bénédiction, la vie pour l’éternité (Ps 133 v 3b). C’est l’union fraternelle référée à l’huile dont Dieu avait oint Aaron souverain sacrificateur (v 1-2) et, ainsi, à une rosée pour Sion (v 3a). Or Aaron préfigurait Christ seul souverain sacrificateur, seul nom dans lequel il faut s’assembler.
Je suis au milieu d’eux : c’est une réalité que nous devons croire.
Avant tout, Christ est au milieu de nous parce qu’il l’a dit ; et quand nous remplissons sa condition : être venus en son nom. Voilà la juste compréhension de l’église, la compréhension fondamentale. Ce n’est pas simplement qu’en église on parle de lui, c’est qu’il est là. Ce n’est pas théorique, c’est une approche concrète vers Jésus ressuscité ; lui qui se rend particulièrement présent au milieu de nos réunions. La seule condition que Jésus a posée, « deux ou trois en mon nom », ne doit s’effacer devant rien !
Une manière de l’effacer est de croire que moi et Jésus ça vaut l’Église. Il ne faut pas que, glorieusement sûr d’avoir tous les jours Jésus avec moi, je dissolve dans cette certitude l’assurance plus glorieuse : celle que Jésus donne en disant « au milieu d’eux ». En effet, ce « au milieu d’eux » est prémices du rassemblement céleste (Ap 5 v 9), plus que ne peut l’être ma relation personnelle avec Jésus. Si Jésus est présent au milieu de son église, c’est directement par son Esprit et non par l’intermédiaire de sa présence avec moi. C’est une erreur trop fréquente de lire les « nous » du NT comme des « je ». Ainsi, il est écrit que Dieu nous a co-ressuscités et co-assis en Jésus Christ (Eph 2 v 6), et non qu’il m’a ressuscité et assis individuellement.
Une autre manière d’effacer la condition « deux ou trois en mon nom », est de confondre Jésus et ses serviteurs les plus en vue. Comme s’il avait dit par exemple : si vous invitez tel prophète, je serai au milieu de vous. Ou : si vous jouez telle musique, ça fera venir ma présence. Certes le NT détaille le rôle de divers dons ou ministères (pas celui de la musique, voir l’article : COMMENT LE NT PARLE-T-IL DE LA LOUANGE ?) mais jamais ne fait d’eux la cause de la présence de Dieu. Cette cause c’est la convergence des membres vers Christ. Attention donc, quand Moïse ou David ont été déterminants pour la présence de Dieu avec Israël, ce n’était pas en tant que préfigures de nos pasteurs, ni même des apôtres, mais de Christ qui seul est Emmanuel, Dieu avec nous (Es 7 v 14).
Je suis au milieu d’eux : ça se découvre et ça se manifeste par chacun.
Venus autour de lui en son nom, nous croyons qu’il est au milieu de nous. Donc nous agissons d’autant plus en son nom, nous manifestons mieux qu’il est là. Si tous prophétisent et qu’il survienne quelque non croyant … les secrets de son cœur sont dévoilés ; alors il adorera Dieu, et publiera que Dieu est réellement au milieu de vous (1 Co 14 v 24-25). Ce verset et le suivant sont clairs : quand Christ est au milieu il se manifeste d’une manière ou d’une autre, et : quand il se manifeste c’est fondamentalement à travers chaque membre.
Voici le verset suivant : Que faire donc, frères ? Lorsque vous vous assemblez, chacun a-t-il un cantique, une instruction, une révélation, une langue, une interprétation ; que tout se fasse pour l’édification (v 26). Ce verset, trop négligé, détaille un peu ce qu’il faut faire en réunion d’église (que ce soit dans une maison ou une salle). Car il tire sa force de : là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis au milieu d’eux. Hélas, en structurant nos cultes autour de quelques ministères et conducteurs de louange, nous nous sommes rendu impossible d’obéir à : chacun a-t-il un cantique, etc. Il est écrit chacun. Ce n’est pas une préoccupation égalitaire ou démocratique, ce n’est pas caser son chant favori ou son dada doctrinal. Le contexte du chapitre suggère que les mots « chacun a-t-il » désignent ce que Dieu inspire pendant la réunion, car chacun est là au nom de Jésus.
Sur quoi compter pour voir Jésus présent dans nos réunions ?
Par rapport au NT nos cultes présentent une disproportion entre ce qu’un tout petit nombre prépare à l’avance (Jésus est avec moi) et ce que chaque membre reçoit sur place (je suis au milieu d’eux). Il suffit d’équilibrer les proportions. En 1 Co 14, Paul mentionne la prophétie de quiconque ; et les cinq contributions qu’il ajoute au v 26 ne semblent pas former une liste limitative. Chacun a-t-il un cantique : le proposer ou l’entonner. Une instruction : par tout membre que Dieu inspire à souligner un point de la vérité. Une révélation : chacun peut partager ce que Dieu lui illumine. Une langue : un don que, parmi d’autres, l’Esprit Saint distribue comme il veut. Une interprétation : le don qui suit, sans quoi l’église n’est pas édifiée par ce qui a été dit en langues (v 27) ; dans ce cas Paul dit de se taire (v 28). Et se taire si un autre a une révélation (v 30). À cela peuvent légitimement s’ajouter : une prière, un texte biblique, un témoignage, etc. Remarque : quand j’entends un membre prier en réunion, mon cœur est sensible au fait qu’il parle à Dieu, pas à moi ni aux autres ; alors, au-delà de ce qu’il dit, sa prière me tourne vers celui à qui il parle.
Pour que tout cela édifie la foi de l’église, chacun doit apprendre à discerner l’inspiration de Dieu. Il faut que certains cessent de croire que toutes leurs pensées sont inspirées, et que d’autres se mettent à croire qu’eux aussi sont inspirés.
Obéir à 1 Co 14 v 26 n’implique pas de nier que Christ donne certains pour diriger (1 Th 5 v 12) ou enseigner (1 Tim 5 v 17). Simplement, il ne les donne pas pour être le centre, encore moins pour amener la présence de Dieu (voir l’article : COMMENT LE NT PARLE-T-IL DE L’ONCTION ?). En conclusion, pour que rien n’usurpe la position de Christ tête de l’Église, il faut penser l’église à partir de « là où deux ou trois sont assemblés en mon nom, je suis au milieu d’eux ».
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