La crainte envers Dieu est peut-être ce qui existait en l’homme avant que la rupture n’en fasse une peur. C’est une profonde empreinte laissée pas sa grandeur : il est le Très-Haut (Gn 14 v 18). Entre sa dimension et la nôtre, existe une sainte disproportion : autant les cieux sont élevés au-dessus de la terre, autant mes voies sont élevées au-dessus de vos voies (Es 55 v 9). Jésus dit : vous êtes d’en bas, moi je suis d’en haut (Jn 8 v 23). C’est une grâce d’être de ceux qui, devant Dieu, sont saisis au point de se prosterner et le croire. Ceux qui sont pétrifiés et heureux, sanctifiés et saisis, qui écoutent et se sentent insuffisants. En un mot ceux qui craignent l’Éternel. Comme Lévi qui tremble devant lui et détourne les siens du mal (Mal 2 v 5-6).

Cet article (catégorie 15 mn) fait suite à :  CRAINDRE DIEU OU AVOIR PEUR DE LUI ?)

et est suivi de :  COMMENT CRAINDRE DIEU EN PRATIQUE ?

 

 

première partie

MAINTENANT JE SAIS QUE TU CRAINS DIEU

 

Avoir conscience d’une disproportion entre Dieu et nous, c’est humble et moral et spirituel.

C’est une grâce d’être impressionné par la Seigneurie divine, qui est à la fois redoutable et heureuse : le bienheureux et seul Souverain, le Roi des rois et le Seigneur des seigneurs, qui seul possède l’immortalité, qui habite une lumière inaccessible, que nul homme n’a vu ni ne peut voir : à lui honneur et puissance éternelle (1 Tim 6 v 14-16).

En être marqué rend humble : si tu cours avec les piétons et qu’ils te fatiguent, comment pourras-tu lutter avec des chevaux ? (Jér 12 v 5). Surtout, la marque inscrite par la majesté de Dieu traverse notre conscience morale : tu es trop juste, Éternel, pour que j’entre en procès avec toi (v 1). Oui, il y a de quoi être ébranlé : son visage devint comme le soleil et ses vêtements blancs comme la lumière (Mt 17 v 2), une voix sortit de la nuée disant : celui-ci est mon Fils bien-aimé en qui je me complus, écoutez-le (v 5) ; les disciples furent saisis d’une violente crainte (v 6).

 

Maintenant je sais que tu crains Dieu et que tu ne m’as pas refusé ton fils, ton unique.

(Gn 22 v 12) C’est Dieu qui atteste cela à Abraham par l’ange de l’Éternel. Il atteste combien est précieuse la crainte d’Abraham. Elle est le résultat de : l’Éternel dit à Abram (Gn 12 v 1), et : l’Éternel conclut une alliance avec Abram (15 v 18), et : marche devant ma face (17 v 1), etc. En cela, le patriarche se savait différent de la plupart des gens : je me disais qu’il n’y avait sans doute aucune crainte de Dieu en cet endroit (Gn 20 v 11).

En relevant que, pour Abraham, obéir à Dieu (Gn 22 v 2) avait primé même sur le fils de la promesse, c’est aussi nous que Dieu enseigne. En nous aussi, la crainte de son nom est un répondant intérieur à la vérité : au commencement Dieu ! (Gn 1 v 1). Dans l’ensemble de la Bible, comment Dieu mène-t-il des gens à le craindre ? En les mettant face à lui, saint, puissant, bienveillant : sa création et ses provisions, ses commandements et son salut, ses miracles et ses jugements.

 

Craindre Dieu est merveilleusement salutaire.

Je conclurai avec eux une alliance éternelle … je leur ferai du bien, et je mettrai ma crainte dans leur cœur afin qu’ils ne s’écartent pas de moi (Jér 32 v 40). Il y a une crainte qui éloigne de Dieu (Exd 20 v 19), et il y a une crainte qui attache à Dieu : Dieu est venu, c’est pour que sa crainte soit devant vos yeux, afin de ne pas pécher (v 20). La Bible détaille très abondamment le bien prévu pour ceux qui craignent l’Éternel : il les aime (Ps 147 v 11), il les bénira (Ps 115 v 13), son œil est sur eux (Ps 33 v 18), son ange campe autour d’eux (Ps 34 v 8), son salut est près d’eux (Ps 85 v 10), etc. Ils sont heureux (Ps 112 v 1). À eux sa compassion et sa direction : à l’homme qui le craint, l’Éternel montre le chemin qu’il doit choisir (Ps 25 v 12), sa pensée est pour ceux qui le craignent (v 14). Job, alors qu’il est encore en atroce douleur, témoigne que Dieu dit à l’homme : voici, la crainte du Seigneur c’est la sagesse, s’écarter du mal c’est l’intelligence (Job 28 v 28). Exact contraire de l’homme qui ne voit pas pourquoi il craindrait Dieu (Ps 36 v 2).

 

La Bible montre également une crainte de Dieu qui n’est pas liée à la rupture.

Frémir devant Dieu et haïr le mal (Prov 8 v 13), est-ce seulement jusqu’à ce que Dieu nous réconcilie avec lui-même ? Non. Parlant d’un vécu admirablement conforme à ce que Dieu aime (Act 5 v 32), le NT dit que l’Église était en paix et marchait dans la crainte du Seigneur (Act 9 v 31) : c’est une crainte en paix ! Même après la victoire sur la bête, le cantique de Moïse et de l’Agneau précisera : Seigneur, qui ne te craindrait et ne glorifierait ton nom, car seul tu es saint (Ap 15 v 3-4). Même après que Dieu ait jugé la grande Babylone, la voix qui sort du trône pour dire : louez Dieu, vous tous ses serviteurs, précisera : vous qui le craignez, petits et grands (Ap 19 v 5).

Sans contredit, la crainte de l’Éternel subsiste à toujours (Ps 19 v 10). Le sommet de ce que la Bible en dit concerne le Messie incarné dans la postérité de David : l’Esprit de l’Éternel reposera sur lui … Esprit de crainte de l’Éternel ; il respirera dans la crainte de l’Éternel (Es 11 v 1-2). C’est cet Esprit Saint que Dieu a donné aux disciples de son Fils.

 

 

 

deuxième partie

LA CRAINTE DE L’ÉTERNEL EST LE COMMENCEMENT DE LA SAGESSE

 

Le mot ‘commencement’ désigne-t-il le ‘début’ (Prov 9 v 10) ou le ‘principe, la tête’ (Prov 1 v 7, Ps 111 v 10) de la sagesse ? Si la crainte de l’Éternel n’était qu’une première étape en attendant de mieux le connaître, l’exhortation à craindre serait absente des textes adressés à ses proches. Nous avons vu que la Bible montre l’inverse. Craindre Dieu est le sommet de la sagesse. (note : dans mon zèle pour dénoncer la peur, j’ai un temps prêché que craindre Dieu n’était que pour le début, mais il m’a sévèrement repris sur ce point)

 

Une raison permanente de craindre Dieu, c’est qu’il est Dieu.

Les versets qui enseignent de craindre concernent le créateur (craignons l’Éternel qui donne la pluie, Jér 5 v 24). Ils font le lien entre craindre Dieu et le glorifier (ex. Ps 22 v 24, Lc 7 v 16). Ils éclairent la crainte de Dieu par le fait qu’il est saint (dans la crainte qui t’est due je me prosterne devant ton saint temple, Ps 5 v 8). Ils font le lien entre connaître que sa main est puissante et avoir toujours la crainte de l’Éternel (Jos 4 v 24). Le créateur n’est pas notre collègue, le Saint que nous glorifions n’est pas notre égal, sa puissance n’est pas notre propriété.

Moïse explique : l’Éternel demande que tu le craignes, afin d’aimer et de servir l’Éternel (Dt 10 v 12). Quand on n’est pas frappé de sa grandeur, on se sert soi-même, et on développe un amour passion car on s’imagine que Dieu est comme l’homme. Dans les Écritures, la crainte de Dieu est bien au-dessus du respect : honorez tous les hommes, aimez vos frères, craignez Dieu, honorez le roi (1 Pi 2 v 17). Ce verset enseigne une différence entre ce qui est dû à tous et ce qui est dû aux frères, et une plus grande différence pour ce qui est dû à Dieu. Être pénétré de sa majesté permet un amour qui consiste à nous donner à Dieu, plus qu’à vibrer pour lui.

Jésus dit : le Père est plus grand que moi (Jn 14 v 28). Que Dieu soit plus grand que nous est imprimé dans notre âme. Ça nous retient de toute familiarité indue. Par exemple, Dieu commande de l’aimer et des milliers l’ont fait ; étonnamment la Bible ne les montre pas disant : ‘je t’aime Éternel’, sauf une fois (Ps 18 v 2, mais avec un autre verbe). Jésus appelle ses disciples ‘amis’ mais jamais un personnage biblique n’appelle Jésus ‘ami’. Sans doute parce que, entre Dieu et nous, les relations ne sont pas symétriques contrairement à l’idée humaine d’amitié. Où est le saisissement devant Dieu si, pensant promouvoir l’intimité avec lui, on outrepasse ce qui est écrit ?

 

Une autre raison de craindre Dieu, c’est l’écart qui subsiste entre ce que nous recevons de lui et notre infirmité actuelle.

Dans les versets du NT qui commandent la crainte de Dieu, elle est reliée à la gloire de ce qu’il nous a acquis, et à la faiblesse qui nous caractérise encore (n’aie pas des pensées hautaines mais crains, Rm 11 v 20). Cette crainte est un sentiment de gravité : puisque nous recevons un royaume inébranlable, ayons de la reconnaissance en rendant à Dieu un culte avec crainte (Hb 12 v 28). Elle a une haute notion de sa paternité : si vous invoquez comme Père celui qui juge chacun selon ses œuvres, conduisez-vous avec crainte pendant le temps de votre séjour (1 Pi 1 v 17). Elle s’impose là où nous sommes déficients : soumettez-vous les uns aux autres dans la crainte de Christ (Eph 5 v 21). Elle réfrène ce qui est charnel : puisque nous avons de telles promesses, purifions-nous de toute souillure de la chair et de l’esprit en développant jusqu’à son terme la sainteté dans la crainte de Dieu (2 Co 7 v 1). Elle nous presse de lui plaire.

Tous ces versets montrent que craindre Dieu est bien plus que le révérer avec émotion, c’est agir selon lui (Néh 5 v 15) : la crainte de l’Éternel est une source de vie, pour s’écarter des pièges de la mort (Prov 14 v 27). Nous craignons Dieu quand, pour nos choix de vie, sa volonté nous astreint plus que la nôtre.

 

Il y a une crainte que Jésus recommande expressément.

Tout en excluant la peur, la crainte de Dieu inclut de frémir concernant l’enjeu qui est devant l’humanité déchue : je vous le dis à vous mes amis … craignez celui qui après avoir tué a le pouvoir de jeter dans la géhenne, oui vous dis-je, c’est lui que vous devez craindre, Dieu (Lc 12 v 4-5). Que tout homme évite de s’endurcir et de devoir un jour dire aux montagnes : tombez sur nous et cachez-nous loin de la face de celui qui est assis sur le trône, et de la colère de l’Agneau (Ap 6 v 16). Mais aussi, que tout disciple de Christ – sans craindre les persécuteurs – soit conscient d’une perdition des impies et cherche leur salut : connaissant donc la crainte du Seigneur, nous cherchons à convaincre les hommes (2 Co 5 v 11). Car seul le Seigneur répond aux deux grandes impossibilités humaines : ne pas mourir, et être exempt du mal.

 

Mon cœur ne tremble qu’à tes paroles.

(Ps 119 v 161) C’est connaître la voix du berger (Jn 10 v 4). Ça nous préserve de mettre dans sa bouche des paroles qu’il n’a pas dites, et d’atténuer des paroles qu’il a dites. Paul, tout en affirmant un focus sur Jésus crucifié, et une démonstration d’Esprit et de puissance, dit : j’étais auprès de vous dans un état de faiblesse, de crainte et de grand tremblement (1 Co 2 v 2-4). Certes, nous ne comprenons ces choses qu’en partie. Et, si un infime rapport semble persister entre la peur et la crainte de l’Éternel, c’est peut-être parce que nous expérimentons les deux dans un même organe, nos émotions.

En tout cas, craindre Dieu c’est conserver une marque de sa sainte grandeur, et un besoin de s’y soumettre. Cela subsiste même dans la joie : elles quittèrent le tombeau avec crainte et une grande joie (Mt 28 v 8).