En général, le NT emploie des mots différents selon qu’il s’agit du dessein de Dieu pour son Fils unique, ou de son projet pour les rachetés. Concernant Christ, l’accent est sur le plaisir de Dieu (‘dessein’ traduit un mot grec signifiant bon-plaisir, du verbe employé en Mt 3 v 17 : en lui je me complais). Concernant les saints, l’accent est sur la volonté de Dieu (‘dessein’ traduit d’autres mots grecs, signifiant vouloir et prédestination).
Le royaume des cieux est semblable à un roi qui fit des noces pour son fils.
(Mt 22 v 2) Pour les invités, plaire à Dieu c’est honorer son Fils ! Il est son Fils monogène (Jn 3 v 16) c’est à dire le seul qui soit engendré et non créé. Les prophéties sur le Messie disent son œuvre pour nous… et disent sa valeur sans égale pour Dieu. Le Ps 110 (cité en Mt 22, Mc 12, Lc 20, Act 2, Hb 1) signale une chose inouïe : assis à la droite du Seigneur, Christ est Seigneur de David, et seul sacrificateur pour toujours. La Bible révèle que Dieu, qui est à l’origine de tout, a voulu donner à son Fils la primauté sur tout. L’Évangile concerne son Fils (Rm 1 v 3), littéralement : est autour de son Fils.
La Bible montre que pour Dieu il y a un élu : son Fils unique.
Dieu avait proclamé : mon élu en qui mon âme se complait (Es 42 v 1) puis, à la transfiguration : celui-ci est mon Fils élu (Lc 9 v 35). Pour Dieu, Christ est le Fils de son amour (Col 1 v 13), en lui, tout a été créé, dans les cieux et sur la terre (v 16a), tout a été créé par lui et pour lui (v 16b), il est avant toutes choses et tout subsiste en lui (v 17), afin d’être en tout le premier (v 18), il a plu à Dieu de faire habiter en lui toute plénitude (v 19). Une réflexion chrétienne sur le sens de la vie ne peut pas ignorer ces versets ! Christ est la raison d’être de tout ce que Dieu a fait.
Notre place près de Dieu résulte du bon plaisir qu’il a en son Fils.
C’est comme une belle-fille de roi qui n’est pas reine mais, aux yeux du roi, a pour grande valeur d’être liée au fils ; elle est princesse royale seulement parce que lui est fils royal. De même, nous sommes élus de Dieu, non en vertu de notre valeur, non comme sommet du dessein divin, mais en Christ l’Élu. C’est parce qu’il se complait en lui, que Dieu nous a bénis de toute bénédiction (Eph 1 v 3), nous a élus avant la fondation du monde (v 4), et par Christ nous a prédestinés à une filiation adoptive pour lui (v 5). Cela résulte du mystère de sa volonté, le dessein bienveillant qu’il s’était proposé en lui, réunir sous une seule tête, le Christ, tout ce qui est dans les cieux et ce qui est sur la terre (v 9-10). Ces derniers mots signifient, d’après l’ensemble de la Bible : réunir sous Christ tout ange ou homme qui l’écoutera.
L’Écriture crée une intime conviction : il y a en Dieu un ‘christocentrisme’ qui est la raison et le cadre de notre création ultérieure et de son amour particulier pour ceux qui aiment son Fils. Lui est le but, nous sommes un but connexe. Si nous sommes prédestinés, c’est afin qu’il soit lui le premier-né d’un grand nombre de frères (Rm 8 v 28-30).
Il est un commencement qui prime sur le commencement.
« Au commencement était le Logos auprès de Dieu » (Jn 1) a précédé et produit « au commencement Dieu créa le ciel et la terre » (Gn 1). Le Fils éternel est en amont, tout a été fait par lui (Jn 1 v 3). Bien que l’homme apparaisse comme point d’orgue de la création, la Bible n’en conclut pas que pour Dieu il est le but central. Lire Gn 1 et 2 comme clé de l’Évangile, peut mener à une inversion grave : l’homme serait le but de Dieu, et Christ serait plutôt le moyen de ce but. Certes un moyen admirable, Sauveur cru et loué, mais qui existerait surtout pour nous ramener dans la position d’Adam et Ève. Or il n’y a aucun texte dans le NT qui cite l’Éden comme but de l’espérance chrétienne, ni comme base de notre mission.
Pour Dieu, Christ est le centre de son dessein, donc il est le rédempteur des élus. « Tout a été créé par lui et pour lui » ne doit pas devenir « tout a été créé pour nous ». Certes Dieu nous donne tout mais sans la gloire humaine : tout est à vous, vous êtes à Christ, Christ est à Dieu (1 Co 3 v 21-23). S’il parle énormément de sa volonté envers nous c’est que, handicapés par la rupture, nous avons besoin d’appels répétés ; mais il révèle que le sens de notre appel est d’être à Christ.
Nous ne nous appartenons pas à nous-mêmes.
Tout enfant sainement aimé de ses parents finira par comprendre que leur amour mutuel existe en amont de leur amour pour lui, et en est l’essence ; seul l’enfant roi, adolescent toute sa vie, se veut le centre de tout. Être éclairés par la Bible sur la nature christocentrique du dessein de Dieu, produit de la maturité spirituelle. Et produit deux choses. Une beaucoup prêchée : vivre de Christ et non de notre énergie propre, et une difficilement pratiquée : vivre pour Christ et non pour nous-mêmes. Lui qui nous a rachetés à grand prix (1 Co 6 v 20) nous enseigne la conséquence : vous n’êtes pas à vous-mêmes (v 19). Cela est à entendre d’autant plus que nous voyons le Jour s’approcher (Hb 10 v 25). Ainsi, la perspective du Jour de Christ s’oppose au courant mondial qui admet la spiritualité… mais la voudrait anthropocentrique.
Conclusion
Être chrétien c’est avoir revêtu Christ, c’est aussi le voir souverainement élevé ! Le livre ultime de la Bible le présente comme l’Agneau seul associé à Dieu sur le trône, et présente les fils adoptifs comme ses serviteurs (Ap 22 v 3).
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