Heureux le chrétien qui dit tout à Dieu !  Toutefois, si seule compte la vie présente, si les prières ne résultent que d’impératifs terrestres, elles n’ont pas l’axe qu’enseigne la Bible. C’est à dire ne poursuivent pas le dessein éternel de Dieu.  Quand Jésus dit : entre dans ta chambre, ferme la porte, et prie ton Père qui est dans le lieu secret (Mt 6 v 6), il fait écho à un verset d’Ésaïe : va, mon peuple, entre dans tes chambres, et ferme les portes derrière toi ; cache-toi pour quelques instants, jusqu’à ce que la fureur soit passée (Es 26 v 20). Quel en est le contexte ?

 

Esaïe 26 montre à quoi se connecte la prière.

Le chapitre est un cantique, où prier se connecte à l’œuvre globale de Dieu sauveur et juge.  Chanter l’Éternel : il nous donne le salut pour murailles (v 1).  Se confier en lui (v 3). Nous espérons en toi, ô Éternel, sur le sentier de tes jugements ; t’appeler et t’invoquer, tel est le désir de l’âme (v 8).  L’honorer comme juge : mon esprit te cherche, car lorsque tes jugements s’exercent sur la terre, les habitants du monde apprennent la justice (v 9).  Reconnaître un esclavage au péché, et la grâce : Éternel, notre Dieu, d’autres seigneurs que toi ont dominé sur nous ; mais c’est grâce à toi seul que nous invoquons ton nom (v 13).  Accepter sa correction sur les siens : ils t’ont cherché quand ils étaient dans la détresse, ils ont épanché leur prière, ta punition (éducative) était sur eux (v 16).  Avouer une stérilité : nous avons conçu, nous avons souffert, et quand nous enfantons, ce n’est que du vent (v 18).  Confesser la résurrection future : et la terre redonnera le jour aux défunts (v 19).

C’est le contexte du v 20 : va mon peuple, entre dans tes chambres… c’est à dire confie-toi en Dieu qui juge le monde. Dans Es 26, prier poursuit ce que Dieu fait pour racheter les siens.

 

Matthieu 5-6-7 concerne les enjeux éternels.

Quand Jésus évoque Es 26, c’est dans le cadre du sermon sur la montagne :  Le royaume des cieux est aux pauvres en esprit, cœurs purs, persécutés, pleins d’œuvres bonnes, sans adultère ni même convoitise, aimant leurs ennemis… (Mt 5).  Non pour paraître, sanctifiant le nom de leur Père, ne s’amassant pas des trésors sur la terre, ne s’inquiétant pas pour leurs besoins… (Mt 6).  Sans juger, sans profaner, entrant par la porte étroite, mettant en pratique les paroles de Jésus… (Mt 7).  Voilà à quoi se connecte : prie ton Père dans le lieu secret (6 v 6), ou : demandez et l’on vous donnera (7 v 7) !

Quelle prière cherche premièrement le règne de Dieu et sa justice (Mt 6 v 33) ?  Celle qui s’attache au dessein du Dieu sauveur. C’est là que nourriture et vêtement seront donnés par-dessus. C’est là que Dieu récompensera, là qu’on évite le chemin large de la perdition, qu’on fait la volonté du Père, qu’on prie : pardonne-nous nos offenses.

 

Nos besoins comptent mais la prière doit servir le dessein de Dieu.

Il faut prier pour nos besoins ou détresses, et ceux d’autrui (faites connaître à Dieu vos demandes, Phil 4 v 6). Mais pas premièrement.  Car cela, ce sont les païens qui le recherchent ; or votre Père sait que vous en avez besoin (Mt 6 v 32). Si seules les péripéties de l’existence dictent nos requêtes, nous avons beau citer « demandez et l’on vous donnera », nous trahissons ce qu’enseigne Mt 5-6-7.  Surtout si nous glissons insensiblement d’une prière pour nos besoins vers une prière d’après notre volonté. Prier selon notre volonté est l’obstacle multimillénaire, mais : si nous demandons quelque chose selon sa volonté, il nous écoute (1 Jn 5 v 14). Bien sûr, si nous imaginons que tous nos désirs sont sa volonté, c’est déjà faussé.

En un mot, la faiblesse de nos prières c’est qu’elles sont monopolisées par des choses passagères plus que par les enjeux éternels. Jésus a eu compassion des gens dans le besoin. Or, concernant la prière, il montre aussi autre chose : les foules nombreuses se rassemblaient pour l’entendre et pour être guéries de leurs maladies, mais lui se retirait dans les déserts et priait (Lc 5 v 15-16).

 

Les prières de Jésus étaient connectées aux affaires de son Père.

Voici tous ses sujets de prières, rapportés dans les Évangiles.  Prières pour ses disciples : J’ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille pas (Lc 22 v 32).  Je prierai le Père et il vous donnera l’Esprit de vérité (Jn 14 v 16).  Père saint, garde-les en ton nom (Jn 17 v 11a).  Qu’ils soient un comme nous (v 11b), en nous (v 21).  Qu’ils aient en eux ma joie parfaite (v 13).  Sanctifie-les par la vérité (v 17).  Que là où je suis, ceux que tu m’as donnés soient aussi avec moi, afin qu’ils contemplent ma gloire (v 24).  Que l’amour dont tu m’as aimé soit en eux, et que moi je sois en eux (v 26).  Prières pour d’autres : Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font (Lc 23 v 34).  Ce n’est pas pour (les miens) seulement que je prie, mais encore pour ceux qui croiront en moi par leur parole, afin que tous soient un (Jn 17 v 20-21a).  Afin que le monde croie que tu m’as envoyé (v 21b).

Toutes ces prières étaient des prières de fond, servant le dessein de Dieu !  Il y a des choses pour lesquelles le Seigneur Jésus n’a pas prié. Par exemple : qu’aucune peine ne touche mes disciples, ou bien : que l’entreprise de pêche de Simon soit prospère, ou encore : que l’occupation romaine prenne fin. L’absence de telles demandes éclaire ce qu’est la prière connectée aux enjeux éternels.

Pour une vie de prière exaucée, c’est la Bible qui donne l’axe. Rien ne doit le remplacer, aucune nouveauté dans la forme, aucun témoignage extraordinaire de besoins comblés.  Prier en vue du dessein de Dieu, c’est servir l’Évangile qu’il a caché aux sages et révélé aux enfants (Lc 10 v 21).

 

Voir aussi l’article :  DEMANDEZ TOUT CE QUE VOUS VOUDREZ

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