Quelle est la notion biblique d’alliance, et pourquoi est-elle si importante ? La réponse apparaît, lentement, au long des textes où Dieu en parle.

 

première partie

ALLIANCES AVANT ABRAHAM

 

Au tout début, il y a bénédiction sans ombre ni distance entre Dieu et Adam. Mais, dans ce récit de la création, Dieu ne parle pas d’alliance ; peut-être réserve-t-il le mot à ce que plus tard il fera pour remédier à la rupture ? Car bientôt il y a désobéissance, puis sanctions et annonce d’une espérance. Ensuite, peu seront proches de Dieu. Abel, puis personne pendant longtemps. Jusqu’à Enosch : c’est alors que l’on commença à invoquer le nom de l’Éternel (Gn 4 v 26). Puis Hénoc marcha avec Dieu (5 v 22). Puis Noé obtint la faveur de l’Éternel (6 v 8).

 

Alliance avec Noé.

Dieu vit que toute chair avait une conduite corrompue sur la terre (Gn 6 v 12), alors Dieu dit à Noé : j’ai décidé de mettre fin à toute chair (v 13), fais-toi une arche de bois (v 14), je vais faire venir le déluge sur la terre pour détruire toute chair (v 17), mais avec toi j’établirai mon alliance ; tu entreras dans l’arche (v 18). Cette première mention d’une alliance, dit déjà l’essentiel. Pour l’épargner pendant le jugement sur le mal, le Puissant (mon alliance) offre son salut au faible (avec toi). C’est une initiative de Dieu : lui va sauver, Noé va croire et obéir. L’alliance de Dieu n’est jamais un contrat entre deux parties égales, elle est une offre de protection qui requiert fidélité.

 

L’alliance avec Noé profite à tout être vivant.

Après le déluge Noé bâtit un autel à l’Éternel (Gn 8 v 20). Nouveau commencement, Dieu bénit Noé ainsi que ses fils (Gn 9 v 1). Il leur redit : Dieu a fait l’homme à son image, il redit : soyez féconds et multipliez-vous, peuplez la terre et multipliez-vous sur elle (v 7). Par cet ordre, des gens vont naître et œuvrer, tous redevables au fait que Dieu avait offert à Noé une alliance personnelle. Maintenant il la réaffirme, à lui et ses fils : quant à moi, j’établis mon alliance avec vous (Gn 9 v 9).

Mais aussi il l’étend à tous les humains qui naîtront : votre descendance après vous (v 9). Et même à tous les êtres vivants qui sont sortis de l’arche (v 10), oiseaux et animaux terrestres. Ainsi étendue, ce n’est plus une alliance de relation personnelle à Dieu. Les termes sont : il n’arrivera plus que toute chair soit retranchée par les eaux du déluge (v 11). Dieu ne fait pas d’autre promesse, ni ne requiert de fidélité, car cette alliance-ci offre non le salut mais la possibilité de naître et prospérer sans craindre un nouveau déluge. Elle redonne potentiels et ressources terrestres, mais sans mention de bénédiction ou pas, de marche avec Dieu ou pas.

 

 

deuxième partie

ALLIANCE AVEC ABRAHAM

 

Ça commence par une élection : l’Éternel dit à Abram…

(Gn 12 v 1)  Choix divin, intervention souveraine !  Dieu appelle : va-t-en de ton pays. Dès le début, il demande une foi docile : vers le pays que je te montrerai. Tout de suite, il fait des promesses : je ferai de toi une grande nation. Et : je te bénirai … deviens donc source de bénédiction (v 2). Aussitôt, Dieu précise qu’Abram sera le critère pour être béni ou pas (v 3), annonçant : toutes les familles de la terre seront bénies en toi. ‘En toi’ est exclusif. AT et NT y insisteront beaucoup, il s’agit d’une élection (Rm 9 v 11).

Abram partit, comme l’Éternel le lui avait dit (v 4). Alors Dieu ouvre quelque chose d’inédit : l’Éternel apparut à Abram ! Ce faisant il suscite adoration et prière (abandonnées après Noé ?) : Abram bâtit là un autel à l’Éternel qui lui était apparu (v 7). Et encore ailleurs : il bâtit un autel à l’Éternel, et invoqua le nom de l’Éternel (v 8). Clairement, est ouvert à Abraham un rapport avec Dieu, un remède à la rupture. Or cela inclut : va-t-en de ton pays, l’alliance de Dieu coupe d’autre chose.

 

L’Éternel conclut une alliance avec Abram.

(Gn 15 v 18)  La personne de l’Éternel en est la garantie : je suis moi-même ton bouclier, et ta récompense sera très grande (v 1). À son appel et ses promesses, Dieu apporte cette précision : un héritier qui sortira de tes entrailles (v 4), et par lui une descendance nombreuse comme les étoiles (v 5). Et Abram crut en l’Éternel (v 6) ! La foi de ce jour-là s’ajoute à celle du jour où il s’était mis en marche ; oui, la foi répond à la promesse. Héritier, descendance, pays, par quoi Abram reconnaitra-t-il la certitude des promesses ? Par une alliance conclue comme suit :

Ayant pris des animaux indiqués par Dieu, Abram les coupa par le milieu et mit chaque moitié vis à vis de l’autre (v 9-10), balisant une ébauche de chemin dans le sacrifice même. Mystère pour Abram, qui doit chasser les oiseaux de proie (v 11), avec veille et frayeur (v 12). L’Éternel dévoile la suite, malheur (ta descendance sera esclave et maltraitée pendant 400 ans, v 13) et salut (mais je jugerai, et ils sortiront, v 14). Dans le chemin ébauché l’Éternel entre, faisant surnaturellement alliance : une fournaise fumante et des flammes passèrent entre les animaux coupés (v 17), en ce jour-là l’Éternel conclut (coupa) une alliance avec Abram (v 18) : je donne ce pays à ta descendance. Est-ce là l’origine de la colonne de feu qui, plus tard, guidera les descendants hors d’Egypte ? En tout cas, c’est cette alliance avec Abraham qui sera précisée avec Moïse comme alliance de sang.

 

L’alliance est une continuité, et demande un engagement.

À nouveau l’Éternel apparut à Abram : je suis le Dieu Tout-Puissant, marche devant ma face et sois intègre (Gn 17 v 1). Le puissant protège le faible et se l’attache. J’établirai mon alliance entre moi et toi (v 2). Certes elle est déjà conclue, mais elle se continue. Dieu parle : voici mon alliance avec toi : tu deviendras père d’une foule de nations (v 4). C’est pour sceller ce point précis que Dieu renomme Abram en Abraham (v 5).

Ensuite Dieu lui prescrit un geste d’engagement : toi et tes descendants après toi, dans toutes leurs générations … vous vous circoncirez en signe d’alliance entre vous et moi (Gn 17 v 9 à 11). Abraham le fait, et tous les siens, étrangers inclus (v 23).

 

Alliance avec Abraham et sacrifice suprême.

Que l’alliance avec Abraham doive inclure à terme une foule de nations, Dieu va le jurer suite à un épisode clé. Prends ton fils, ton unique (unique en ce que la promesse doit s’accomplir par lui), celui que tu aimes, Isaac ; et offre-le en holocauste (consumé entièrement) sur l’une des montagnes que je t’indiquerai (Gn 22 v 2). Abraham obéit avec foi. L’Éternel intervient, pourvoit à un bélier à la place d’Isaac (v 13), puis jure par lui-même : parce que tu as fait cela, et que tu ne m’as pas refusé ton fils, ton unique, je te comblerai de bénédictions (v 16), toutes les nations de la terre se diront bénies par ta descendance, parce que tu as écouté ma voix (v 18).

Dès Gn 12 l’Éternel avait dit que les familles de la terre seraient bénies en Abram, mais ici il le rattache à : tu ne m’as pas refusé ton fils. Pourquoi a-t-il demandé ce fils ? Pour que l’obéissance inouïe d’Abraham aide ses descendants à comprendre la manière inouïe dont Dieu va remédier à la rupture : donner son Fils unique, afin que quiconque croit en lui ne périsse pas mais ait la vie éternelle. Ce sera le sacrifice de sang sur la croix. Or celui par qui tout humain pourra être béni, est le descendant (au singulier) d’Abraham : promesse faite à ta descendance c’est à dire à Christ (Gal 3 v 16).

 

 

troisième partie

ALLIANCE PROLONGÉE AVEC MOÏSE, PUIS EN NOUVELLE ALLIANCE

 

Ce que Dieu fait avec Moïse est continuité de l’élection d’Abraham.

Dieu se souvint de son alliance avec Abraham, Isaac et Jacob (Exd 2 v 24). Il appela Moïse (3 v 4) : c’est moi le Dieu de ton père, le Dieu d’Abraham (v 6). J’ai vu la misère de mon peuple (v 7), je suis descendu pour le délivrer (v 8). Le contexte est un jugement, dix plaies frappent l’Egypte qui asservissait les enfants d’Abraham, à qui Dieu avait dit : ils sortiront. Avant même leur sortie, avant de leur parler d’alliance, Dieu met les Israélites au bénéfice du sang (selon son alliance avec Abraham). Le moyen même de leur sortie montre comment Dieu délivre de la mort : par le sang de l’agneau de Pâque (Exd 12 v 5-6). Seul ce sang, mis docilement sur les linteaux (v 7) et vu par l’Éternel (v 13), fait la différence entre ‘tu mourras’ et ‘il n’y aura pas sur vous de fléau destructeur’ (v 12-13). Célébrer cette Pâque est prescription perpétuelle (v 24), ne pas la célébrer c’est être retranché de son peuple (Nbr 9 v 13). Fait significatif, elle est également pour l’immigrant en Israël (v 14).

 

L’alliance est pour appartenir à l’Éternel en propre.

L’Éternel appela Moïse du haut de la montagne, disant : voici ce que tu annonceras aux Israélites (Exd 19 v 3) : si vous gardez mon alliance, vous m’appartiendrez en propre entre tous les peuples, car toute la terre est à moi (v 5). Selon le livre d’Exode c’est l’alliance avec leur père Abraham. L’Éternel en dit le sens : vous serez pour moi un royaume de sacrificateurs, et une nation sainte. Aussitôt délivrés d’Egypte, les Israélites s’entendent donc dire le sens de leur affranchissement : sanctifier le nom de l’Éternel aux yeux des peuples. Suit le décalogue (Exd 20) qui donne les modalités fondamentales.

 

Comment Dieu confirme-t-il l’alliance à Moïse et tout Israël ?

Il fait écrire toutes ses paroles à Moïse (Exd 24 v 4), il lui fait bâtir un autel (id), il fait offrir des holocaustes (v 5). Et Moïse répandit le sang (pour moitié) sur l’autel (v 6), il prit le livre de l’alliance et le lut au peuple (v 7), il prit le sang (l’autre moitié) et le répandit sur le peuple, en disant : voici le sang de l’alliance que l’Éternel a conclue avec vous, sur la base de toutes ces paroles (v 8). Ces deux expressions : le livre de l’alliance, et : le sang de l’alliance, disent ce que Dieu fait pour Israël, ce qu’il requiert de lui, et ce qu’il lui promet. Voici particulièrement ce que Dieu fait pour Israël : le sang, je vous l’ai donné sur l’autel, afin qu’il serve d’expiation pour votre vie (Lév 17 v 11).

Ce sang et la loi remédient à la chute, ombres du remède véritable. Faveurs en Israël, car sans effusion de sang, il n’y a pas de pardon (Héb 9 v 22 évoque Exd 24 v 8). Faveur accomplie : ceci est mon sang, le sang de l’alliance, qui est répandu pour beaucoup (Mc 14 v 24).

 

La nouvelle alliance a été promise à Israël.

Les alliances sont : celle avec Abram, attachée à Isaac (Gn 17 v 21), confirmée à Jacob (Gn 18 v 13-14), prolongée avec Moïse (son élu, Ps 106 v 23), redite à David (roi préfigurant le Messie, Ps 89 v 4-5), nouvelle en Christ. Je conclurai avec la maison d’Israël et la maison de Juda une alliance nouvelle (Jér 31 v 31) ; je mettrai ma loi au dedans d’eux, je l’écrirai sur leur cœur, je serai leur Dieu et ils seront mon peuple (v 33). Jésus l’appelle : la nouvelle alliance en mon sang. C’est bien à Israël qu’elle est donnée : je n’ai été envoyé qu’aux brebis perdues de la maison d’Israël (Mt 15 v 24). C’est à dire que Jésus ne bâtit pas une église qui succède à Israël, ni qui le remplace, mais une église où des païens sont incorporés à Israël pour avoir part à la promesse (Eph 3 v 6). Là, ceux qui ont la foi (en Christ crucifié) sont fils d’Abraham (Gal 3 v 7), si vous êtes à Christ, vous êtes la descendance d’Abraham (v 29).

En ce sens Jésus dit : le salut vient des Juifs (Jn 4 v 22). Paul écrit : les Israélites à qui appartiennent l’adoption, la gloire, les alliances, la loi, le culte, les promesses, les patriarches ; et de qui est issu, selon la chair, le Christ qui est au-dessus de toutes choses, Dieu béni éternellement (Rm 9 v 4-5). Israël est défini par l’alliance de Dieu avec Abraham, qui présente celle de Christ. Encore aujourd’hui, c’est ça qui fait la valeur spécifique et le sens d’Israël. Et l’infidélité de quelques-uns ne rendra pas sans effet la fidélité de Dieu (Rm 3 v 3).

 

L’élection d’Abraham fonde l’alliance, dont le but est le lien au Fils élu.

Pourquoi Dieu ne sauve-t-il pas les nombreuses ethnies en appelant de nombreux ‘Abram’ ? Parce qu’il veut révéler non « un salut » mais « un Élu » : la vie éternelle est en son Fils, celui qui a le Fils a la vie, celui qui n’a pas le Fils de Dieu n’a pas la vie (1 Jn 5 v 11-12). Le fait même que l’appel d’Abraham soit exclusif, manifeste la vraie élection de Dieu : mon élu (Es 42 v 1), mon Fils élu (Lc 9 v 35). La nouvelle alliance appelle à la communion de son Fils (1 Co 1 v 9).

 

Conclusion.

Qui dit le mieux l’étroit lien entre alliance d’Abraham et nouvelle alliance ? C’est Jésus : Abraham a tressailli d’allégresse à la pensée de voir mon jour, il l’a vu et il s’est réjoui (Jn 8 v 56, cp Héb 11 v 10 et 13).

(lire aussi :  L’ÉLECTION ET LES ALLIANCES DE DIEU  et :  D’APRÈS LA BIBLE, QUE FAUT-IL ESPÉRER ?)